Print this article   Email this to a friend

Conseil

Réunion du Conseil de l'IS en Turquie

11-12 novembre 2013

2270_303055.jpg
Latifa Perry

 

Le Conseil de l’Internationale Socialistes s’est réuni dans la ville d’Istanbul les 11-12 novembre, accueilli par le parti républicain du peuple, CHP, un membre de l’IS. Des délégations de près de 100 partis et organisations de tous les continents ont assisté à la réunion qui avait comme thèmes principaux: «Les crises actuelles liées aux luttes pour la démocratie, notamment au Moyen-Orient et en Afrique du Nord et les conflits qui menacent la paix et la sécurité dans cette partie du monde» et «Réaffirmer la vision de centre-gauche pour l'économie mondiale en mettant l'accent sur la croissance, l'emploi et l'égalité, et pour un nouvel agenda pour le développement». Une session spéciale a été dédiée aux événements plus tôt dans l’année dans le parc Gezi.

La réunion a débuté par un hommage à la mémoire de l’ancien Président de l’IS et Premier ministre français Pierre Mauroy qui est décédé en juin dernier. La mémoire de Yasser Arafat a également été commémorée, cette date étant le neuvième anniversaire de sa mort. Le Conseil a exprimé sa sympathie et condoléances aux victimes de l’immense tragédie aux Philippines ainsi qu’aux familles et collègues des deux journalistes, Ghislaine Dupont et Claude Verlon, de Radio France Inter, qui ont été enlevés et assassinés au Mali dans une attaque terroriste. Il a été rendu hommage aux six personnes qui ont tragiquement perdues leurs vies pendant les manifestations du parc Gezi à Istanbul. Le Conseil s’est levé et a observé une minute de silence.

En ouvrant la réunion le Secrétaire général de l’IS Luis Ayala a remercié le CHP de leur hospitalité et a souhaité la bienvenue aux délégués. Il dit qu’Istanbul en tant que lieu du Conseil était le bon endroit pour aborder les luttes actuelles pour la démocratie, les libertés et les droits dans des pays voisins et au-delà, et pour exprimer notre solidarité avec ceux qui courageusement font avancer les principes et valeurs que nous partageons. En même temps, nous allions construire sur l’esprit du Gezi parc qui a mobilisé des centaines de milliers de citoyens en Turquie et qui ont capturé l’imagination du monde. Une question cruciale dans nos discussions allait être la guerre en Syrie dont nous voulions voir la fin, ainsi qu’une solution négociée aboutissant dans un gouvernement de transition et la démocratie. La démocratie allait également être l’objectif dans nos discussions sur les développements en Egypte, au Yémen et dans d’autres pays du monde arabe qui actuellement traversaient des jours décisifs. La paix entre les Palestiniens et Israéliens ainsi qu’une solution de deux Etats restaient une priorité cruciale et nous devrions embarquer dans un programme actif pour contribuer à cet objectif. Une autre priorité qui devait être traitée, était de faire avancer des stratégies pour la croissance, l’emploi, le développement durable et la solidarité humaine, pour confronter les effets nocifs des politiques d’austérité, de l’inégalité croissante, du mépris de l’environnement et des agendas basés purement sur des intérêts nationaux. L’Internationale appartenait à tous ses membres et l’engagement de tellement de personnes pour son objectif faisait sa force.

Kemal Kili?daro?lu, leader du parti hôte et un Vice-président de l’IS, a chaleureusement souhaité la bienvenue à tous les délégués au Conseil, exprimant le plaisir et honneur que le parti ressentait en accueillant la réunion. Il a souligné la grande importance que le CHP attachait à son adhésion à l’Internationale Socialiste, la plus grande organisation progressiste et social-démocratique au monde, et au travail du CHP au sein de l’IS dans la défense de la justice, la démocratie, l’égalité et du pluralisme, contre l’oppression et l’inégalité, non seulement en Turquie mais dans toute la région et dans le monde. Il a souligné trois problèmes significatifs auxquels les luttes démocratiques dans la région devaient faire face: les groupes d’extrémistes et les forces réactionnaires, des lignes de faille ethniques, religieuses et sectaires qui créaient de l’instabilité, et la possibilité que l’intervention étrangère, surtout une intervention militaire, pourrait donner une légitimité à des régimes oppressifs et encourager des groupes extrémistes. Tous ces problèmes économiques et politiques, dit-il, nécessitaient une réponse démocratique. Il conclut en citant Willy Brandt: «La paix est plus que l’absence de guerre…elle nécessite un développement équitable et des opportunités pour toutes les nations». (discours complet)

Le Premier ministre de Belgique et un Vice-président de l’IS, Elio Di Rupo, a souligné la nature unique de l’Internationale Socialiste en tant que forum mondial pour la poursuite d’objectifs communs et en particulier pour la lutte contre l’injustice et l’inégalité. Ceux qui avaient des responsabilités exécutives doivent aider ceux qui luttent aussi pour le progrès social mais dans l'opposition. Nos citoyens ne devaient pas devoir payer le prix d’une crise dont ils étaient les premières victimes, dit-il. L’Europe ne pouvait pas se résumer à un grand marché sans valeurs humaines, et le monde non plus d’ailleurs. La crise financière devait servir de réveil et non pas être une occasion pour les cyniques de détruire nos systèmes de sécurité sociale que les socialistes et sociaux-démocrates ont construit année après année depuis la Deuxième Guerre Mondiale. La politique extérieure de l'Europe ne pouvait pas être guidée par le seul souci aveugle de sécurité, sans quoi, cela pourrait mener à accepter de coexister avec des dictatures sans écouter et soutenir la légitime aspiration de liberté de celles et ceux qui subissent la tyrannie. Il a salué les efforts de l’Internationale Socialiste en faveur du dialogue et en soutien de ceux qui aujourd’hui luttent pour la démocratie et une société libre de l’extrémisme. Partout où la souffrance sévit, dit-il, nous devions continuer à nous battre pour trouver des solutions justes et humaines. Il faut que la diplomatie triomphe et nous devons appeler à la tenue de la conférence Genève II. Au Proche Orient, nous devions soutenir les négociations de paix en cours entre Israël et Palestine et soutenir sans réserve les efforts de tous ceux qui veulent sincèrement une solution à deux Etats.

Le Président de l’IS George Papandreou a remercié Kemal Kiliçdaro?lu et son parti pour leur hospitalité chaleureuse. En tant que citoyen grec et un voisin, il appréciait la nouvelle amitié entre les deux pays, une chose qui semblait impossible il y a quelques années. Il a rappelé l’esprit qui stimulait leur travail de rapprochement, l’engagement commun pour la paix et le fusionnement en une famille commune de valeurs que représentait l’Europe. Il a souligné la crise actuelle en Europe, qui avait faussement été appelée financière - elle était profondément politique -, dit-il, et il s’agissait d’une crise de légitimité démocratique. Plus de solidarité était nécessaire et la mise en commun de ressources pour contrer la méfiance et le recours aux politiques nationalistes et tribales. En soulignant que le socialisme était plus pertinent que jamais, il a exprimé le fort engagement de l’Internationale pour les valeurs fondamentales de la démocratie et des droits de l’homme, la justice sociale, la croissance durable verte ainsi que la résolution pacifique des conflits, qui devaient toutes faire face à des défis de plus en plus intenses à travers le monde. Nous devions réinventer la démocratie pour créer une plus grande unité parmi le peuple, dit-il, et démocratiser la mondialisation pour combattre l’inégalité croissante au sein et entre les sociétés. Ce qui était en jeu était la paix mondiale et l’existence de notre civilisation. Tous les thèmes de notre ordre du jour étaient liés à la démocratie, non seulement dans les pays touchés par les soulèvements récents, mais également dans des démocraties matures, où il y avait besoin d’un système plus transparent et plus représentatif. Afin de réussir nous devions être unis, dit-il, et réussir nous le devions. (discours complet)

La première partie de la matinée a été dédié à une session spéciale sur les événements dans le parc Gezi, qui ont commencé en mai de cette année en protestation contre la démolition du parc, introduit par Umut Oran, un vice-président du CHP. Suite à la présentation d’une vidéo émouvante, des contributions spéciales ont été faites par des représentants de différentes organisations et mouvements impliqués dans ces événements, y compris Amnesty International, les Syndicats progressistes de Turquie, le Mouvement musulman révolutionnaire et la Chambre d’architectes, ainsi que des artistes et activistes. Les témoignages directs ont créé une image puissante et vibrante des événements sur la place Taksim et de la lutte pour les droits démocratiques et libertés en Turquie. Une déclaration sur les manifestations dans le parc Gezi a été adoptée à la fin de la réunion.

Sous le premier thème principal, l’attention portée par l’IS aux développements en Syrie et le besoin d’une fin à la violence et d’une solution politique au conflit ont servi de fond aux discussions sur la situation actuelle dans ce pays. Ahmad al-Jarba, Président du Coalition nationale des forces de la révolution et de l'opposition syrienne, qui avait été invité spécialement pour s’adresser au Conseil, a informé les délégués de la décision de l’organisation, prise le même jour, de participer à la conférence de Genève II. Ce pas décisif pour ouvrir la voie aux négociations de paix a été accueilli favorablement par les délégués, dont de nombreux ont souligné le rôle important à jouer par la communauté internationale afin de trouver une résolution du conflit en Syrie. (liste des intervenants)

Des contributions au débat sur la Syrie ont été faites par le délégué officiel de la Ligue des Etats arabes à la réunion, Mohamed El Fatah Naciri, qui a présenté le point de vue de cette organisation gouvernementale multilatérale jouant un rôle clé, et par Wael Abou Faour, qui a apporté des perspectives de grande valeur de son point de vue en tant que ministre au gouvernement du Parti Socialiste Progressiste (PSP), le parti membre de l’IS au Liban, un pays qui est profondément touché par le conflit et la crise des réfugiés.

Sur les développements dans le monde arabe, le nouveau Premier secrétaire de l’USFP, Maroc, Driss Lachguar, s’est adressé au Conseil, et les représentants des partis membres de l’IS en Egypte et au Yémen ont décrit la situation actuelle dans ces pays et la lutte continue par le peuple pour les droits, libertés et la démocratie.

Une résolution sur la Syrie a été adoptée, présentant l’engagement du Conseil pour une fin des affrontements et solution politique comme seul moyen pour parvenir à une paix durable en Syrie. La fin de la guerre civile et la mise en place d’un gouvernement de transition devraient être les deux piliers sur lesquels devra reposer le processus de Genève II. Le Conseil a de même adopté des déclarations sur l’Egypte et le Yémen, qui résument le point de vue de l’Internationale et les questions abordées durant le débat.

Dans les discussions sur la paix et la sécurité, les perspectives pour la paix au Moyen-Orient et le rôle de l’IS dans ce processus étaient au centre de l’attention. Des contributions ont été faites par des délégués du Meretz, Israël et du Fatah et PNI, Palestine. Avec le soutien de ses partis membres en Israël et Palestine, le Conseil a désigné 2014 comme l’année pour la paix au Moyen-Orient, et est convenu dans la déclaration sur la paix au Moyen-Orient, d’un programme d’actions qui seront exécutées tout au long de l’année pour faire avancer la cause de la paix et de la solution de deux Etats.

Sur le sujet de la démocratie, le Conseil a reçu des contributions de représentants de la région du Sahel en Afrique et d’autres pays du continent, où le processus démocratique est bloqué. (Liste des intervenants) Parmi ceux-ci, il y avait la situation particulièrement importante en Mauritanie, où les partis de l’opposition, y compris le RFD, parti membre de l’IS, boycottaient les prochaines élections dû à l’absence d’un cadre démocratique réel. Le Conseil a reçu un rapport du parti membre en Guinée équatoriale, le CPDS, sur les défis à la démocratie dans ce pays. Le Conseil a de plus été informé des avancées faites en Guinée, où sous la direction du Président Alpha Condé du parti membre de l’IS, RPG, les premières élections législatives démocratiques avaient eu lieu récemment. Reconnaissant l’importance capitale de la question de la démocratie dans le continent africain, une décision a été prise de mandater la prochaine réunion du Comité Afrique de l’IS de présenter une résolution sur la démocratie en Afrique à être discutée et considérée lors du prochain Conseil.

Un message spécial au Conseil de Mikalai Statkevich, ancien candidat présidentiel et leader de l’opposition du Belarus emprisonné, a été lu à haute voix. Malgré des appels à sa libération par l’IS et un nombre de gouvernements et d’organisations internationales, Statkevich est toujours privé de liberté et de nombreux de ses droits les plus fondamentaux dans une prison du Belarus. Dans sa lettre il a remercié l’IS et ses partis membres pour leur soutien et travail constant en faveur des droits et libertés en Belarus.

Sur le deuxième thème principal, la vision social-démocratique pour l’économie mondiale, des intervenants de différentes régions et origines ont contribué leurs points de vue. (liste des intervenants) Reconnaissant que dans les années à venir l’économie mondiale ainsi que des économies nationales devront faire face à des défis importants, les interventions sur ce sujet, et la résolution adoptée, ont souligné le besoin que les forces progressistes mènent la lutte pour des réformes structurelles et du secteur bancaire, le besoin d’action contre la fraude fiscale illégale et l’évasion, le développement mondial, la lutte contre l’inégalité et la pauvreté et pour la solidarité sociale, une énergie propre et une croissance verte. La résolution adoptée définit un agenda de croissance, d’emplois, de développement durable et de solidarité humaine, et appelle à une coopération entre les forces progressistes et les organisations de société civile pour parvenir à ces objectifs clés.

Conformément à la décision prise par le Présidium lors de sa réunion au siège des Nations unies à New York le 26 septembre, le Conseil de l’IS a également adopté une position sur la question actuelle et importante de l’espionnage et la surveillance. Une déclaration sur cette question décrit le besoin de respecter le droit international et ses institutions pour remédier à la perte de confiance en les gouvernements dû aux révélations récentes de la cyber-surveillance sanctionnée par des Etats.

Sur le Porto Rico, le Conseil a réaffirmé la résolution de sa réunion précédente adoptée à Cascais, et décidé que l’IS allait assister à l’examen de ce cas par le Comité de Décolonisation de l’ONU.

Les deux comités statutaires, le Comité Ethique et SIFAC, qui avaient été nouvellement formé conformément aux réformes adoptées par l’IS pour garantir une représentation géographique équitable de l’organisation, et donc plus ouverts et transparents, ont présenté leurs rapports au Conseil. Dans son rapport, Gilles Mahieu (PS, Belgique), le nouveau Président du Comité Ethique de l’IS, a informé le Conseil que le comité a discuté et adopté un règlement d’ordre intérieur pour son travail. Dans l’analyse des demandes d’adhésion, le Comité avait une recommandation à faire au Conseil, d'accorder l’adhésion en tant que membre observateur au Parti pour la Justice et le Bien-Etre (JWP) du Somaliland, attendant ratification par le prochain congrès en accord avec les statuts de l’IS. Le Conseil a approuvé le rapport du Comité ainsi que la recommandation faite sur le JWP du Somaliland.

Le Conseil a également reçu un rapport du Comité d’Administration et des Finances de l’IS (SIFAC), présenté par Maurice Poler (AD, Venezuela), Co-président de SIFAC. Il a donné un rapport sur le travail du comité et sur la situation financière actuelle de l’IS, attirant l’attention sur la liste des cotisations impayées. Le Conseil a été informé que le comité était unanime sur le fait qu’aucune décision unilatérale sur le niveau des cotisations dues par un parti membre ne pouvait être acceptée, puisqu’en accord avec les statuts le comité fait une recommandation sur les cotisations pour approbation par le Conseil. Le Comité avait, en accord avec son mandat, discuté les nouveaux niveaux des cotisations, était convenu d’un budget pour 2014 et avait approuvé les comptes vérifiés pour 2012, qui ont tous les deux été présentés au Conseil et adopté, ainsi que le rapport du comité.

Une élection a été tenue afin de pourvoir le poste vacant d’un Vice-président d’Amérique latine, lors de laquelle Rafael Michelini, leader du Parti Nouvel Espace (NE), Uruguay, a été élu à l’unanimité. En accord avec la décision du Conseil précédent concernant la composition du Comité Ethique, le Parti des Sociaux-Démocrates Bulgares (PBSD) a été élu comme parti membre restant de ce comité statutaire de l’IS.

Le rapport du Secrétaire général sur les activités récentes de l’organisation depuis le dernier Conseil a été introduit.

Lors de la clôture de la réunion, le Président et Secrétaire général de l’IS ont réitéré encore une fois leur gratitude qui avait été exprimé par tous les délégués (liste des participants) envers les hôtes pour leur hospitalité fraternelle. Le Vice-président du CHP Faruk Lo?o?lu a remercié tous ceux qui ont participé à la réunion au nom du parti hôte.
 
 

 

Procès-verbal de la réunion du Conseil