Print this article   Email this to a friend

Congrès

XIXème Congrès de l'Internationale Socialiste, Berlin

15-17 septembre 1992


RESOLUTION DU CONGRES

 

Introduction

Le congrès de l'Internationale socialiste à Berlin est consacré à l'examen des défis d'une nouvelle époque historique. Cette nouvelle époque est l'une des révolutions de l'ordre politique, social et technologique.

La disparition du Mur de Berlin a marqué la fin d'une longue période de conflit idéologique amer, et de souffrances sans précédent. Elle a inauguré le plus grand progrès de la liberté de l'histoire. L'Internationale socialiste, dont les idéaux de liberté, de justice et de solidarité l'ont placée au premier rang du triomphe de l'idée démocratique, entreprend maintenant la tâche complexe de soutenir la révolution démocratique, et de faire en sorte que ses avantages soient étendus à tous.

Les événements historiques de 1989 dans la cité maintenant unifiée de Berlin continuent d'inspirer ceux qui luttent encore contre l'oppression. Les régimes dictatoriaux continuent d'exister dans plusieurs pays. La torture, l'absence de lois, et la violation des droits et libertés de base, persistent dans de nombreux pays qui tentent de devenir des démocraties. Les socialistes démocrates doivent donc continuer à défendre les droits de l'homme partout où ils sont violés, et continuer à soutenir fermement les efforts des démocrates engagés pour construire de meilleures sociétés.

La fin de la guerre froide a contribué à nous rendre plus conscients d'un monde changeant avec rapidité et de plus en plus interdépendant dans lequel les principes du socialisme démocratique sont plus vitaux que jamais. L'économie globale a apporté des bouleversements structurels et donné naissance à une vague de capitalisme dur indifférent aux valeurs humaines. Ces développements menacent les démocraties fragiles et sapent la qualité de la vie dans les nations industrialisées.

La célébration du progrès récent de la liberté doit être contrecarrée par le fait que les sociétés des nations nouvellement démocratisées ne sont pas plus équitables qu'elles ne l'étaient il y a dix ans. Les gouvernements font face à d'énormes attentes de la part des citoyens, mais sont empêchés d'agir par le legs des économies contrôlées par l'Etat, d'énormes dettes étrangères, et les exigences en période d'austérité des institutions financières internationales. La tentation d'utiliser des moyens autoritaires pour moderniser les économies a déjà provoqué des reculs pour la démocratie dans certains pays. Même au sein des démocraties industrialisées, les institutions démocratiques et la société en général sont sapées par la dislocation des emplois et des personnes, et par l'accent toujours plus marqué sur les valeurs commerciales aux dépens des valeurs humaines. La tendance actuelle, si elle continue, relèguerait la grande majorité de la population du monde à une sous-classe globale. Ce résultat est non seulement injuste, mais aussi hostile à la survie de la démocratie, et extrêmement dangereux dans un monde d'interdépendance écologique, de vagues de migration en masse, et d'armement en prolifération.

L'Internationale socialiste, possédant des partis affiliés dans pratiquement tous les pays de chaque continent, promeut une meilleure compréhension et une plus grande coopération entre les nations faisant face à des problèmes globaux communs. De plus, nos valeurs relient tous les secteurs de sociétés de plus en plus complexes. La solidarité socialiste démocrate est fondée sur un engagement partagé envers les principes fondamentaux réaffirmés et redéfinis durant le congrès de Stockholm il y a trois ans. Elle tire sa force de la diversité au sein des nations et entre elles, et fournit un antidote essentiel au racisme, à la discrimination ethnique et à la xénophobie, toutes en résurgence.

La démocratie telle que nous la définissons (avec des droits politiques, une justice sociale et des opportunités économiques égalitaires) est la seule forme de démocratie qui survivra. Il est vrai que les mécanismes des marchés et la compétition sont nécessaires pour la croissance et le développement économiques, mais il est également vrai que les marchés libres n'assurent pas la justice. Le socialisme démocratique reconnaît donc l'Etat en tant que serviteur nécessaire du peuple pour garantir une société juste et équitable. Les gouvernements doivent être efficaces et doivent être tenus responsables de leur conduite par un échange de vues et des décisions démocratiques ancrés dans une société civile forte et représentative. La conservation des droits (et la réconciliation des droits individuels avec les droits collectifs des travailleurs, des femmes, des groupes ethniques et des communautés indigènes) dépend d'une responsabilité partagée entre les gouvernements et les citoyens.

Alors que le monde approche de l'an 2000, l'une des tâches cruciales est de démocratiser les changements économiques. L'échec du communisme n'est pas la victoire du capitalisme pur. La décennie qui vient de s'écouler nous a fourni suffisamment de preuves comme quoi le "ruissellement'' ne se produit pas, et que le capitalisme sans surveillance est également enclin à la corruption et à la dégradation de l'environnement.

Nous ne pouvons donc pas permettre aux forces qui ont été cruciales dans la lutte pour la liberté (les syndicats ouvriers, les mouvements civiques, les groupes de droits) de se laisser pousser de côté. Ce sont des instruments indispensables dans la construction de sociétés justes et équitables. Tout accord d'intégration commerciale ou économique parmi les nations doit comprendre une charte sur les droits du travail, et sociaux et économiques, et un accord sur la sauvegarde de l'environnement. Des normes sur le travail doivent en particulier être établies afin d'éviter que l'exploitation des ouvriers soit le point principal de la compétition économique.

De plus, les aides au développement offertes par les nations industrialisées ne doivent pas être liées uniquement à des réformes économiques. Elles doivent également être liées à la construction d'institutions démocratiques et doivent se pencher sur les besoins de base des portions les plus pauvres de la population, avec un accent particulier sur les femmes et sur les besoins et aspirations des peuples indigènes.

L'Internationale socialiste reste une voix de premier ordre dans l'affirmation du lien entre le désarmement et le développement. Alors que les chances d'obtenir une paix internationale s'améliorent, les opportunités pour une utilisation plus constructive des ressources du monde s'améliorent également. Les organisations internationales, particulièrement les Nations unies, doivent redoubler leurs efforts pour résoudre les conflits régionaux et civils, et pour promouvoir une réduction des armes nucléaires et conventionnelles.

Enfin, la révolution technologique a apporté des modifications profondes dans le monde, modifications qui s'étendent bien au-delà de l'écroulement des idéologies totalitaires. Nous devons relever ce défi et saisir les opportunités présentées par cette révolution afin de développer de nouvelles stratégies pour achever des objectifs sociaux démocratiques. Nous devons modeler des politiques qui adapteront les nouvelles technologies d'information et de diffusion à l'amélioration de l'éducation, de l'alphabétisation, des aptitudes des ouvriers, et de la participation civique. Les jeunes, en particulier, recherchent des opportunités pour se développer en tant qu'individus et pour contribuer à leur société. Ils doivent recevoir les outils et la formation appropriés afin de réaliser leur potentiel.

Nous, socialistes démocrates, sommes conscients des défis complexes et difficiles qui nous sont présentés par cette nouvelle étape de l'histoire, et sommes sûrs de notre approche des tâches urgentes se présentant à nous. Une solidarité inébranlable au nom de la liberté et des droits fondamentaux partout, et des engagements longtemps maintenus envers la justice, la paix et le bien-être des hommes, ont été notre force pour surmonter les obstacles dans le passé. Aujourd'hui, la promesse de liberté et les aspirations de tous les peuples à une vie meilleure, dépendent de l'établissement d'une démocratie durable. Avec un engagement et une initiative renouvelés, l'Internationale socialiste en a fait son objectif.

 

Paix et désarmement

La fin de la guerre froide a promis de faciliter la construction d'un ordre mondial stable, juste et sûr, conformément aux principes de la Charte des Nations unies et de la loi internationale. Les décennies de divisions Est-Ouest, de confrontation politique, idéologique, économique, et militaire, sont terminées. Le moment est maintenant venu de saisir l'opportunité de réorienter nos énergies et nos ressources, de guérir nos anciennes blessures - et de construire un nouvel ordre fondé sur la sécurité commune, la liberté, la justice sociale et la solidarité.

Mais si notre époque offre des promesses et des opportunités, elle se caractérise aussi par l'instabilité et l'insécurité. Comme l'a affirmé le Document d'Helsinki, le déclin économique, les tensions sociales, le nationalisme agressif, l'intolérance, la xénophobie et les conflits entre ethnies mettent la paix et la stabilité en danger. Pour la première fois depuis des décennies, nous assistons à la guerre en Europe. On continue de voir apparaître de nouveaux conflits armés et l'utilisation massive de la force, en violation flagrante de la loi internationale. La torture, les exécutions et les camps de détention rappellent des souvenirs désastreux. Les conflits meurtriers qui continuent d'exister dans l'ex-Yougoslavie risquent sérieusement de se transformer en une vraie guerre.

Il serait tragique pour l'ensemble de la communauté internationale que les occasions créées par la fin de la guerre froide soient perdues et que les pendules soient remises à l'heure des antagonismes du passé, des haines, des rivalités nationales, ethniques et religieuses, et des conflits armés. Notre monde ne peut pas se permettre de suivre une telle voie. L'Internationale socialiste appelle donc les gouvernements, les mouvements sociaux et les individus, à coopérer, au-delà des barrières nationales, ethniques et religieuses, pour réaliser la paix, la liberté et la justice.

Il faut se réjouir du fait que les relations entre les puissances naguère rivales ont évolué de manière positive et sont devenues plus pacifiques et amicales. Cette situation est à l'avantage non seulement des peuples concernés, mais aussi de l'ensemble de la société internationale. A cause des responsabilités spéciales des grandes puissances, un certain nombre de conflits régionaux se rapprochent d'une solution politique, d'importantes réductions des dépenses militaires sont devenues possibles et les Nations unies ainsi que d'autres institutions multilatérales ont été revitalisées.

Les progrès les plus concrets ont été faits en Europe, sur le continent qui avait gravement souffert de la guerre froide. Le Mur de Berlin a été abattu. L'Allemagne a été réunifiée, d'anciens membres du bloc soviétique ont subi une révolution démocratique profonde et font maintenant partie de la famille des nations libres et démocratiques. Les Etats baltes ont reconquis leur indépendance, et dans le sillage de la dissolution de l'Union soviétique, les Etats qui ont pris la suite se sont engagés dans leurs accords conjoints à adopter les mêmes principes et les mêmes dispositions que tous les Etats de la CSCE.

Une grande partie du travail de préparation à ces changements fondamentaux a résulté de l'adoption de "l'Ostpolitik" pendant les années 60, des premières phases de détente et, plus tard, du processus de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE), destiné à surmonter la division de l'Europe sur la base de principes adoptés conjointement à Helsinki en 1975. Les peuples d'Europe orientale et centrale et de l'ancienne Union soviétique ont joué un rôle majeur dans ce développement positif.

La Charte de Paris, adoptée en 1990, marque la fin de la guerre froide et l'avènement d'une ère nouvelle sur ce continent, une ère basée sur la démocratie, les droits de l'homme et l'autorité de la loi. Les Etats qui participent au processus de la CSCE se sont engagés à suivre ces mêmes normes et valeurs. Les décisions qui ont été prises à la conférence destinée à faire le bilan d'Helsinki en 1992, de renforcer les institutions et structures de la CSCE, d'introduire des activités de maintien de la paix dans le cadre de la CSCE, de souligner le caractère d'organisation régionale de la CSCE par rapport à l'ONU, d'établir un haut commissaire aux minorités nationales et de créer un nouveau forum de coopération à la sécurité, sont toutes révélatrices de la volonté politique commune d'éliminer les vieilles animosités et de créer une nouvelle Europe.

La nouvelle situation internationale, principalement en Europe mais aussi dans d'autres régions, demande de toute urgence que la communauté internationale assume de nouvelles responsabilités. Le nouveau climat qui résulte de la fin de la guerre froide offre une immense opportunité de développer le partenariat des institutions et des organisations de sécurité existantes pour parvenir à un système global pour le maintien de la paix mondiale et le renforcement de la sécurité mutuelle et collective. La CSCE a aussi mis en relief la nécessité d'une perspective mondiale de la sécurité, liant la détente et le désarmement à une coopération globale, pour contribuer au développement et surmonter les obstacles culturels et ethniques.

Maintenant que la confrontation politique a pris fin, de nouvelles tentatives de désarmement radical, des réductions des dépenses militaires et l'élimination de certaines anciennes structures, doctrines et équipements militaires sont devenues un impératif logique et l'on assiste au début d'une évolution dans ce sens. Au lieu de la dissuasion nucléaire, de la course aux armements, et de la surmilitarisation de nos sociétés, le monde doit aujourd'hui rechercher la paix et la sécurité par la mise en œuvre de l'idée de sécurité commune et globale. Afin de réaliser ces buts, nous devons travailler pour renforcer la démocratie dans tous les pays, lancer partout des programmes d'éducation pour la paix et assurer le droit à l'objection de conscience et à un service autre que militaire.

L'accord russo-américain prévoyant de réduire radicalement le nombre d'armes nucléaires stratégiques est très bienvenu, et va dans la bonne direction. Par cet accord, les deux Etats les plus fortement armés descendent encore au-dessous des plafonds convenus dans le cadre de START et complètent des décisions antérieures, bien fondées, d'éliminer la plupart des catégories d'armes nucléaires tactiques. Bien que l'Internationale socialiste considère ces décisions comme nécessaires et en accord avec les souhaits et exigences de la communauté internationale, elle continue toutefois de demander d'autres mesures menant au désarmement nucléaire: des réductions encore plus importantes de la part de ces deux puissances; la prévention d'une nouvelle course aux missiles antibalistiques; la fin du développement de l'IDS (Initiative de défense stratégique) par les Etats-Unis et la Russie, et la démilitarisation de l'Arctique; une interdiction totale (enfin) des essais nucléaires (maintenant que les engagements positifs des gouvernements de Russie et de France ainsi que du Sénat américain ont mis ce but tant attendu à portée de main); et la décision, à la conférence de bilan du Traité de non-prolifération (TNP) qui va bientôt avoir lieu, de faire du régime de non-prolifération un élément efficace et permanent des dispositions d'ensemble garantissant le désarmement nucléaire. Nous faisons maintenant appel à toutes les puissances nucléaires pour qu'elles contribuent au processus de désarmement nucléaire stratégique en réduisant leurs propres capacités et en se joignant aux pourparlers sur le désarmement.

En Europe, l'accord de désarmement le plus important qui ait été conclu est le Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FACE), qui a été négocié dans le cadre de la CSCE. Quand il sera mis en œuvre, ce traité donnera lieu aux réductions les plus radicales dans les principales catégories d'armes conventionnelles. Bien que cet accord ait été négocié durant les dernières phases de la période caractérisée par la guerre froide et bien que les réalités politiques aient depuis changé à la suite des révolutions démocratiques d'Europe centrale et orientale, il est impératif que ce traité soit mis en œuvre. Nous nous réjouissons de l'accord résultant des consultations entre la CEI, les Etats de l'ancienne Organisation du Traité de Varsovie et l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) concernant la mise en œuvre du traité et les responsabilités de chacun. De même, le Traité Ciels Ouverts, signé dans le cadre de la CSCE, prévoit de nouvelles mesures destinées à établir un climat de confiance.

L'effet du traité des FACE sur le désarmement se manifeste le plus concrètement en Europe centrale, où le retour en Russie des anciennes troupes soviétiques complète la transformation positive de l'état de la sécurité. L'effet politique positif s'en fait sentir aussi ailleurs en Europe. Cependant, depuis l'indépendance des anciennes républiques soviétiques, de nouveaux déséquilibres locaux et régionaux peuvent intervenir. Il faut absolument éviter que le transfert de troupes et d'armes vers certaines régions militaires de Russie et d'autres Etats de la CEI ne crée de nouveaux déséquilibres en matière de sécurité. Il est tout aussi important de convenir sans délai du retrait complet, dans l'ordre et le plus tôt possible, des anciennes troupes soviétiques postées dans les trois républiques baltes indépendantes, qu'il l'a été de convenir de leur retrait d'Europe centrale. Seule l'élimination de toute cause de spéculation militaire et d'inquiétude en matière de sécurité peut former une base solide pour une coopération pacifique à l'avantage de tous. L'Internationale socialiste favorise donc la conclusion d'accords régionaux de stabilité dans le cadre du nouveau forum de coopération à la sécurité dans le cadre de la CSCE.

La fin de la période de confrontation mondiale a créé des conditions favorables à tous les accords de désarmement et de contrôle des armes. Le traité sur l'interdiction complète des armes chimiques, dont le texte a maintenant été enfin convenu, doit être signé et ratifié par tous les Etats, et sa mise en œuvre doit commencer dès que possible. Les ventes d'armes doivent être réduites par des mesures nationales et internationales. Comme première étape, il faut établir, dans le cadre de l'ONU, un système d'information mondial, un registre des transferts d'armes, que l'on pourra alors développer en un organisme de vérification efficace. Le défi le plus urgent à relever est celui de contrôler de la manière la plus efficace les transferts relatifs aux matières nucléaires, à la technologie des missiles ainsi qu'à d'autres technologies pouvant servir à la fois à l'industrie civile et militaire, qu'elles s'appliquent aux armes de destruction massive ou aux armes dites conventionnelles. La nécessité de contrôler et de réduire les transferts d'armes est soulignée par des expériences récentes d'intensification des conflits régionaux dûs à des transferts d'armes illimités.

Maintenant que les obstacles dûs à la guerre froide n'existent plus, il faut chercher à conclure des accords régionaux pour contribuer au règlement des conflits régionaux. A cet égard, l'expérience de la CSCE nous encourage à recommander d'imiter les processus de prévention des crises, de création d'un climat de confiance et de coopération dans d'autres régions, surtout dans celles où les tensions ont été sérieuses. Des régions telles que la Méditerranée, le Moyen-Orient, la Corne de l'Afrique, l'Asie du Sud et du Sud-Est et l'Amérique latine pourraient bénéficier de telles expériences dans leurs efforts pour réaliser la paix, la sécurité et le développement. Le secrétaire général des Nations unies a bien raison de souligner qu'aucun coin de misère meurtrière ne doit être négligé par la communauté mondiale.

Le moment est venu de mettre en œuvre un régime de sécurité internationale fondé sur la Charte des Nations unies. Nous voulons une amélioration des capacités de l'ONU à prévoir et à empêcher les conflits, notamment par l'établissement d'un système d'urgence mondial. Nous voulons que soit élaborée une structure permettant de faire respecter la loi à l'échelon mondial, conformément à la Charte de l'ONU, se concentrant sur le rôle des sanctions. L'Internationale socialiste plaide avec force en faveur de mesures organisationnelles et financières pour renforcer les capacités de diplomatie préventive, d'apaisement et de maintien de la paix de l'ONU telles que les a proposées le secrétaire général de l'ONU. L'ONU devrait jouer un rôle accru dans les opérations d'aide humanitaire d'urgence. Dans un nouveau rôle de l'ONU, il conviendrait d'envisager d'affecter des troupes et du matériel à une force de réserve pour le secrétaire général. L'Internationale socialiste appuie la proposition du secrétaire général de l'ONU demandant des contributions des budgets militaires nationaux pour la création d'un Fonds des Nations unies pour le maintien de la paix.

De nombreux progrès ont été réalisés et peuvent continuer d'être réalisés à l'aide d'accords de désarmement internationaux, tant à l'échelon mondial que régional, mais l'Internationale socialiste souligne aussi cependant l'importance des décisions nationales dans la limitation des armements et des dépenses militaires ainsi que de la recherche et du développement dans le domaine militaire.

Depuis plusieurs décennies, le monde consacre des sommes énormes aux dépenses militaires et échoue à faire une utilisation constructive de ces ressources. Il s'éloigne de plus en plus des buts et idéaux inscrits dans la Charte de l'ONU, de préserver la paix et la sécurité en détournant un minimum de ressources humaines et économiques mondiales vers les armements. Le moment est venu de changer de direction, de faire en sorte qu'au lieu d'être dominés par des considérations militaires, nos sociétés nationales et notre ordre international soient conçus pour servir les peuples du monde. Il faut que nous prévoyions et mettions en œuvre des programmes de conversion réalistes et efficaces partout et à tous les niveaux de nos sociétés, tout en restant pleinement conscients des difficultés qui se présenteront pendant la période de transition et du fait que l'économie civile n'est pas seulement conçue pour servir à des buts constructifs, mais a aussi un effet plus positif sur l'emploi que la production militaire.

Les fonds économisés par les limitations d'armes doivent être utilisés pour éliminer l'écart Nord-Sud et pour mettre fin aux désastres sociaux et écologiques qui persistent et qui sont à la base des conflits internationaux. Les pays nantis doivent s'engager de manière concrète à fournir une aide au développement d'au moins 0,7 pour cent de leur PNB. Les pays en développement pourraient mieux diriger les dépenses publiques sur les besoins sociaux et sur des investissements productifs s'ils bénéficiaient d'un allégement de la dette et d'une amélioration de l'aide au développement de la part du Nord. L'édification d'un ordre mondial nouveau requiert que soient reliés de manière efficace les efforts visant au désarmement, au développement et aux droits de l'homme. Une sécurité commune et globale représente la clé permettant d'atteindre ce but. L'Internationale socialiste participe à cet effort avec toute son énergie.

 

Droits de l'homme

L'Internationale socialiste réaffirme que les droits de l'homme et les libertés fondamentales sont d'une validité universelle et constituent un élément essentiel de tout nouvel ordre global basé sur la liberté et la justice. Les droits et les libertés doivent être respectés parmi tous les peuples et toutes les nations, et une vigilance constante et une condamnation de toute violation et de tout déni s'imposent. L'IS est convaincue que le droit des peuples à choisir leur gouvernement par des élections libres et loyales est fondamental. Nous appelons les Nations unies à exiger que leurs Etats membres accordent à tous leurs citoyens et citoyennes le droit de vote actif et passif.

En même temps, l'Internationale socialiste reconnaît les relations entre les diverses catégories de droits et de libertés. Seul un équilibre circonspect des droits politiques et civiques d'une part et des droits économiques, sociaux et culturels de l'autre, peut donner à un système démocratique sa pleine signification et répondre aux besoins de tous les secteurs de la société.

Depuis la formation de l'Internationale socialiste, l'accès à une alimentation, à des logements, à des soins de santé et à une éducation adéquats est devenu beaucoup plus facile, au point d'être dans de nombreux pays presque universel. On a établi des normes internationales de liberté politique et civique, qui ont, malgré des violations fréquentes, contribué à une liberté plus grande du débat politique et à des améliorations de la qualité de la vie. L'IS a apporté une contribution importante à cette évolution et continuera de suivre cette voie.

Au congrès de Stockholm, en 1989, l'Internationale socialiste a défini une plate-forme détaillée concernant les droits de l'homme. Elle couvre les droits civiques, politiques, sociaux et économiques autant que culturels, et s'applique aussi bien aux femmes qu'aux hommes. La plate-forme souligne que les droits de l'homme sont indivisibles et que lorsqu'ils sont violés, la démocratie elle-même est en danger. Elle affirme qu'il est impossible de parvenir à une réelle sécurité sociale quand des individus sont privés de ces droits, que les droits de l'homme doivent être respectés dans toute société quel qu'en soit le degré de développement. De plus, quand l'inégalité sociale menace la paix, les droits de l'homme sont compromis.

Depuis lors, les changements qui ont eu lieu à l'échelon de la politique mondiale ont fait naître de nouveaux défis dans le domaine des droits de l'homme. Ces défis illustrent la relation dynamique entre les droits individuels et collectifs, et leur interaction avec d'autres questions internationales critiques, comme le développement durable, le désarmement, la protection de l'environnement et la justice sociale.

Dans de nombreux pays, les régimes autoritaires ont dû céder la place à des forces démocratiques et à des gouvernements plus respectueux des droits de l'homme. Mais le progrès de la transition démocratique a été inégal. Si dans certains pays on a assisté à une amélioration du respect des droits humains, dans d'autres les progrès ont été d'une lenteur terrible.

Les conflits armés et la prolifération continue des armes de tous types continuent d'apporter la peur et l'horreur à des millions de personnes et sont directement liés à des violations toujours répandues des droits de l'homme, et notamment des droits des enfants. Alors même que l'on se met à reconnaître le racisme comme la force destructrice qu'il est et que des mesures sont prises pour démanteler le système de l'apartheid, de nouvelles formes de tension raciale émergent et trouvent une expression dans la violence. Par ailleurs, la pauvreté, la maladie, l'absence de justice sociale et la famine minent les progrès en matière de droits de l'homme. L'on compte actuellement plus de 17 millions de réfugiés, 20 millions de personnes déplacées, et l'on assiste à une migration massive de personnes à l'intérieur et au-delà des frontières nationales. Ces défis doivent être relevés.

La conférence des Nations unies sur les droits de l'homme qui aura lieu à Vienne en juin 1993 offre une importante occasion de promouvoir les droits de l'homme. A cet égard, nous saluons la volonté politique, exprimée par les membres du mouvement des pays non-alignés dans leur déclaration de Jakarta en septembre 1992, de contribuer pleinement à cette importante conférence et de l'aider à "examiner tous les aspects des droits de l'homme sur la base de l'universalité, de l'indivisibilité, de l'impartialité et de la non-sélectivité".

L'IS appelle la commission préparatoire de la conférence de l'ONU à s'intéresser en particulier à la mise en œuvre et à l'observation de la Déclaration universelle des droits de